Présentation

ULTRALIGHT

La collection d’art de la Ville de Dudelange reflète la politique d’exposition des centres d’art de la ville, car les œuvres de notre collection ont été acquises, à quelques exceptions près, lors des expositions individuelles ou collectives des artistes dans les centres d’art Nei Liicht et Dominique Lang.

Quelle est donc cette politique ?

Nous aspirons à servir de tremplin à de jeunes artistes auxquels nous donnons l’occasion de monter leur première exposition personnelle. Les centres d’art de Dudelange ont fourni ce terrain d’expérimentation qui permet d’apprendre à faire des choix, de voir son travail fonctionner dans l’espace et de s’exposer aux regards critiques et à la confrontation avec le public. Nous sommes des révélateurs de talents, souvent à l’avant-garde de futures réputations et nous avons soutenu des jeunes artistes de Luxembourg sur leur chemin vers des destins internationaux. Ainsi Su-Mei Tse, Marco Godinho, Catherine Lorent, Filip Markiewiecz, Martine Feipel et Jean Bechameil, Sophie Jung, Claudia Passeri et bien d’autres sont passés par Dudelange avant d’avoir été sélectionnés pour la Biennale de Venise par exemple ou pour d’autres lieux et prix prestigieux pour l’art contemporain.

Nous voulons offrir au public de Dudelange et des alentours la possibilité de faire connaissance avec l’art contemporain. Nous invitons donc aussi des artistes de renommée internationale et nationale aux centres d’art. Ces expositions sont très souvent des installations in situ où les artistes profitent des budgets disponibles pour produire un travail expressément créé pour les lieux. François Méchain et Marylène Negro sont des exemples d’artistes qui ont travaillé in situ et la ville a acquis leurs pièces qui attendent des réactivations.

Nous avons invité des curateurs et galeristes à concevoir des expositions avec les artistes de leur choix. Ces expositions sont particulièrement intéressantes pour dégager les tendances actuelles de l’art contemporain et pour montrer la création dans une région ou dans un pays. Il est évident que notre choix ne se limite pas au Luxembourg, nous puisons dans le creuset de la Grande Région et La France et la Belgique sont des partenaires privilégiés. Lors d’une des nombreuses expositions que nous avons organisées avec Café Crème éditions pour le Mois européen de la Photo, nous avons acquis une œuvre emblématique de Rineke Dijkstra, un tirage de 3 exemplaires et dont les deux autres se trouvent au Stedelijk Museum - Amsterdam et au centre Pompidou-Paris.

Ainsi la collection raconte histoire et l’évolution des centres d’art de la ville.

Mais notre collection a aussi un volet historique qui prouve que la ville a toujours eu un intérêt pour les arts visuels. Ainsi le bourgmestre Jean Fohrmann a toujours soutenu ses compatriotes artistes comme Frantz Kinnen, Félix Glatz, Jean-Pierre Calteux, Frans Masereel et beaucoup d’autres, dont il a acquis des œuvres pour la ville. La Ville ouvrière et sidérurgique est souvent le sujet de ces peintures. Elles constituent le début de la collection qui sera complétée par son petit-fils Alex Bodry qui a acquis un merveilleux dessin d’Auguste Trémont et plusieurs peintures de Dominique Lang. Dominique Lang, dudelangeois et un des premiers artistes indépendants luxembourgeois, occupe une belle place dans notre collection.

Au cours des ans, nous avons aussi reçu des généreux dons d’œuvres, ainsi François Liénard et Valérie Péclow, ont acquis au fil des expositions de leur lieu génial le « Chalet de la Haute Nuit » une collection d’art contemporain belge,  qu’ils ont choisi de léguer à nos centres d’art après la cessation d’activités.

Ultralight est le titre d’une œuvre de Daniel Daniel qui fait partie de notre collection. Mais Ultralight est aussi un leitmotiv qui nous a accompagné pour monter cette collection. C’est une collection non prétentieuse mais pas sans prétention. C’est une collection issue d’un geste plus généreux que calculateur, c’est-à-dire que le premier souci est bien d’aider l’artiste à continuer son travail et non de constituer une collection revendable et génératrice de gain. Cela n’empêche pas que le choix des œuvres est fait avec des critères sérieux - la qualité du travail artistique, l'audace de l'artiste et la maîtrise de son médium de prédilection, la cohérence et l'actualité du discours de l'artiste, la relation avec l'histoire de la ville - et que le souci de cohérence existe. Nous n’avons jamais perdu de vue l’idée que la collection est un bien public et qu’elle constitue un héritage social et intégrera le patrimoine commun, mais nous avons toujours pris le parti de l'artiste, du sujet plus que de l'objet-oeuvre.

 Les artistes qui entretemps ont acquis une notoriété, démontrent que les centres d’art régionaux sont bien des révélateurs de talents et une étape très utile dans le parcours d’un artiste.  La légèreté revendiquée ici n’est donc pas une légèreté frivole, une abdication à la dictature du light mais plutôt une apesanteur qui tente de s’approcher de la liberté. Les œuvres ne s’inscrivent pas dans des idéologies lourdes, ni dans l’encombrement des signes, mais elles parlent de leurs époques respectives, de ses aspirations, de ses revendications, de ses rêves et elles nous transportent.

 

Danielle Igniti, directrice et curatrice des centres d’art de 1993 à 2018